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Home Actualités du secteur Novembre Financer la Fibre par les utilisateurs

Financer la Fibre par les utilisateurs

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Entretien avec Laurent Depommier-Cotton, associé de PMP Paris.

Faut-il déjà parler de FTTH alors que l’on termine à peine l’équipement haut-débit du territoire ?

Je crois qu’il est urgent d’accélérer le déploiement de la fibre optique. Les écrans de télévision ou d’ordinateurs de nos foyers sont de plus en plus grands, de plus en plus haute définition, de plus en plus nombreux.

Il faut la fibre pour alimenter correctement tous ces écrans. Grâce à la fibre, on pourra communiquer à distance avec d’autres personnes comme si elles étaient à nos côtés, ce qu’on appelle la téléprésence. Cela permettra aux personnes isolées de maintenir du lien social, de contacter un agent d’un service public sans se déplacer, de se former, de télé-consulter un médecin en cas d’urgence, en cas d’affection bénigne ou pour lever un doute.... La fibre permettra aussi de tirer tout le parti du futur WEB. Il va être envahi par les vidéos à haute définition et il faudra la fibre pour y accéder. Cela permettra à l’internaute de mieux s’informer, de mieux acheter, de se distraire aussi. Et puis la fibre permettra également de regarder la TV en relief, qui commence à apparaître.

De plus, si l’on veut que les entreprises de services numériques se développent en France, il faut d’urgence combler notre retard par rapport aux pays qui sont déjà dans l’ère de la fibre. Le Japon est déjà fibré à 90% et cela tient avant tout à la vision stratégique du gouvernement japonais depuis l’année 2000, que la fibre est indispensable à la fois pour améliorer la qualité de vie d’une population vieillissante et pour la compétitivité de l’industrie numérique du pays.

S’il y a tant d’enjeux, pourquoi les pouvoirs publics ne sont-ils pas plus moteurs ?

Je crois que ces enjeux sont de plus en plus appréhendés par les décideurs publics mais qu’ils sont tétanisés par les coûts évoqués pour déployer le FTTH en France, de l’ordre de 30 à 40 Md€. En réalité, les pouvoirs publics pourraient déployer le FTTH en France rapidement en faisant tout simplement payer la plus grande partie du coût du réseau… par ses utilisateurs !

Faire supporter le coût du réseau par les utilisateurs... Comment ?

D’abord, il faut avoir en tête que l’on compte dans ces chiffres près d’une dizaine de Md€ pour la location des fourreaux de France Telecom. Et si on se concentre sur les français des zones ni très denses qui vont être couvertes spontanément, ni très rurales qui seraient à couvrir par d’autres technologies que la fibre, l’investissement n’est « que » de 20Mds d’€, pour environ 20M de foyers et d’entreprises.  Si l’on estime qu’à terme, presque tous seront clients de la fibre optique, cela fera plus de 15 M d’abonnements et près de 2Md€ de recettes par an, en louant la fibre à peine plus cher que prix actuel de la paire de cuivre. Comme on peut estimer que les coûts d’exploitation et la location de fourreaux à France Telecom seront chacun de quelques centaines de M€, cela laisse plus d’1 Md€ par an d’excédent d’exploitation par an, que générerait ce réseau de fibre.

Une modélisation financière montre que ce montant permet de couvrir environ les ¾ de l’investissement initial de 20Md€ et du coût du capital correspondant, à condition que
l’investisseur ait un coût du capital très faible, qu’il se projette à très long terme (plus de 30 ans), et qu’il sache créer des incitations pour que les opérateurs migrent rapidement sur ce nouveau réseau.

Un acteur en est évidemment capable : l’Etat. Et il a justement le bon véhicule  pour financer ce grand projet fibre : le grand emprunt, avec un impact qui serait assez faible sur les finances publiques puisque les ¾ de l’investissement dans le FFTH seraient remboursés par les recettes tirées de ce nouveau réseau. En fin de compte, le coût restant à la charge des pouvoirs publics serait de quelques milliards, lissé sur plusieurs années.

Et vous y croyez ?

Mais bien sûr. En plus, le FTTH se déploie progressivement, quartier par quartier. Il est possible à tout moment de freiner le déploiement pour diminuer le besoin de financement, voire de l’arrêter sans perdre sa mise. C’est donc une opération à fort enjeu, sans grand risque financier pour l’Etat. Pourquoi ne pas y aller ?

Mise à jour le Mercredi, 30 Décembre 2009 15:21  

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