Bouygues et SFR sonnent le tocsin contre Free mobile

Vendredi, 02 Mars 2012 13:57
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La vague d’émoi provoquée par l’arrivée de Free Mobile parmi les opérateurs de téléphonie mobile ne laisse pas d’attirer l’attention des parlementaires. La commission des Affaires Économiques auditionne depuis quelques semaines les principaux acteurs de ce feuilleton dont le dernier acte s’est tenu le mardi 29 février au Palais Bourbon.

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Après Xavier Niel et Stéphane Richard, c’est donc Frank Esser et Olivier Roussat, respectivement PDG de SFR et de Bouygues Télécom, qui, à une semaine d’intervalle, ont accepté de faire face à un « feu nourri de questions » (dixit Serge Poignant, le Président de la commission). Les deux PDG ne se sont pas fait prier pour déclencher les hostilités et Xavier Niel, souvent en butte à leurs piques, aura sûrement senti ses oreilles siffler tout au long des auditions. 

"Est-ce que l'on peut accepter les vraies-fausses couvertures ?"

Olivier Roussat

Attendu comme principal contempteur de l’accord d’itinérance passé entre Free et France Télécom, Frank Esser, malgré son apparence sereine, n’aura pu masquer son mécontentement tant dans ses réponses aux accents germaniques pointait un dépit évident. Réitérant les propos qu’il a récemment livré à la presse, le PDG de SFR a martelé une même question : « Quelle obligation a un opérateur pour déployer un vrai réseau ? », remarquant que Free ne fournissait pas les efforts nécessaires à l’autonomie de son réseau et laissant ainsi clairement entendre qu’il tenait plus de l'oprérateur virtuel que réel. Mêmes interrogations du côté de Bouygues et d’Olivier Roussat qui tire à boulets rouges sur le réseau de Free et en a appelé à l’autorité de l’ARCEP pour trancher le nœud Gordien : « Est ce que l'on peut accepter les vraies-fausses couvertures ? C'est une lourde question que l'on doit aujourd'hui trancher ».

Frank Esser n’a pas manqué ensuite de détailler ses chiffres sur la couverture du réseau de Free qui sont loin, selon lui, des 27% imposés par l’ARCEP. Cette dernière vient pourtant de confirmer ce pourcentage qu’elle s’est engagée à rendre public. 

Un exemple dont Frank Esser aimerait que Free et France Télécom s’inspirent, lui qui appelle de ses vœux davantage de transparence sur les grands paramètres de l’accord d’itinérance et qui s’est avoué « surpris que l’opérateur historique donne ainsi la clé » de son réseau à un nouvel arrivant estimé fragile. Le dirigeant allemand pointe en effet du doigt la saturation dont aurait été victime Orange suite au succès de l’offre Free qu’il n’hésite pas à qualifier de « low cost ». 

Olivier Roussat est lui revenu avec véhémence sur cet en accord en évoquant une stratégie à court terme de la part de Free et qui reposerait sur le contrat d’itinérance avec France Télécom au détriment de l’investissement dans un réseau autonome requérant un cash que les forfaits «low-cost » ne semblent pas en mesure de dégager : « J’affirme que l’itinérance d’Iliad a été choisie et non pas subie ». Ce choix serait de la poudre aux yeux à l’origine d’une « distorsion de concurrence » dont les effets ne manqueraient pas de se révéler néfastes pour les clients. 

Les deux directeurs se sont complus à dresser un tableau élogieux de leur gestion des ressources humaines auquel ils ont opposé un modèle de rigueur sauvage incarné par Free. 

Frank Esser, comme son homologue de chez Bouygues, a cherché à répondre aux tarifs agressifs de Xavier Niel par « un équilibre qui ne regarde pas seulement les tarifs mais l’investissement dans le réseau et l’accompagnement client ». Les deux directeurs se sont complus à dresser un tableau élogieux de leur gestion des ressources humaines auquel ils ont opposé un modèle de rigueur sauvage incarné par Free.

Le PDG de SFR a conclu son intervention sur une dernière saillie, jugeant qu’il était impossible de financer un réseau à coup d’abonnements à deux euros par mois et ajoutant qu’il avait « des indicateurs comme quoi ces offres ne sont pas pérennes ». 

Reste à savoir si ce coup de boutoir porté aux principaux opérateurs de téléphonie mobile en France aura des conséquences sérieuses sur ces deux groupes et leur permettront, entre autre, de tenir leur calendrier de déploiement pour la fibre optique voulu par Matignon dans le cadre de son programme national « Très Haut Débit ». Bouygues Télécom a déjà fait les comptes : l’opérateur a déclaré avoir vu 139 000 de ses clients partir en direction de Free.

Joseph d'Arrast

Mise à jour le Lundi, 05 Mars 2012 08:55