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Interview d'Emmanuel Tricaud, directeur des affaires réglementaires de Colt Télécommunications France

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Opinion : Emmanuel Tricaud, directeur des affaires réglementaires de Colt Télécommunications France

 

« La décision de Bruxelles ignore tout de la réalité économique »

Quelles réflexions vous inspire cette décision ?

Cette décision véhicule un message extrêmement négatif pour l’investissement privé. Nous voilà dans l’incertitude. Cette nouvelle jurisprudence nous confronte à un problème stratégique de taille parce que la décision de Bruxelles ignore tout de la réalité économique. On applique en effet à une industrie très hautement capitalistique, les télécoms, qui doit investir trois euros pour faire un euro de Chiffre d’affaires, qui a besoin en outre de continuité dans la mesure où la moitié de son investissement court sur 50 ans, une décision prise à l’occasion d’une demande de subventions pour un ramassage scolaire dans une région rurale d’Allemagne (1). Ce pour quoi nous avons investi l’argent de nos actionnaires est maintenant accordé à nos concurrents avec l’aide de l’argent du contribuable. Et ce qui s’applique désormais dans les Hauts-de-Seine peut se généraliser. Qui, sachant qu’il peut se faire couper l’herbe sous le pied, peut continuer à investir sereinement ? Cet élément d’incertitude considérable déstabilise l’investissement privé.

 

Mais la décision de Bruxelles prend aussi en compte la notion de service public…

C’est là le point clef. Le problème est justement que le service public puisse être défini à l’échelle locale. D’abord, ne nous leurrons pas, l’inégalité entre les zones sera fatalement reportée à plus grande échelle. Mais surtout, et c’est plus grave, cela signifie qu’une collectivité peut préempter l’avenir d’une industrie, en l’occurrence les télécoms. Finalement, les télécoms ne fonctionnent plus sur un modèle équilibré par le marché, devant satisfaire la demande solvable. Mais parce qu’elles apportent des externalités qualifiées de gigantesques, on en fait un centre de coûts, sans considération pour les entreprises telles que la notre (2) qui ont investi sur le long terme. La décentralisation fait que nous traitons à l’échelle locale des problèmes nationaux. J’en appelle à un retour au jacobinisme.

 

(1)     Réponse à une question préjudicielle rendue le 24 juillet 2003 par la cour de justice européenne dans l’affaire Altmark

(2)     Infrastructure de long terme, non-délocalisable : 5 milliards d’investissements en 15 ans à l’échelle de l’Europe pour un chiffre d’affaires d’1,6 milliard annuel.

 

 

 

 

 

Mise à jour le Vendredi, 02 Octobre 2009 15:15  

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