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Home Telecom « Les sociétés internet vont devoir trouver de nouveaux formats de publicité efficace. »

« Les sociétés internet vont devoir trouver de nouveaux formats de publicité efficace. »

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EPA 229 

Questions à Jean-David Chamboredon, Président du fonds ISAI

WhatsApp racheté 22 milliards de dollars par Facebook, Snapchat qui rejette une offre de Google à 4 milliards, Twitter qui connait un démarrage en bourse tonitruant avec une capitalisation à plus de 22 milliards, n’est-on pas en train d’assister à la formation d’une nouvelle bulle internet ?

Ce qui caractérise les 3 sociétés que vous citez c'est une audience massive (plusieurs centaines de millions d'utilisateurs) construite finalement en très peu de temps avec une récurrence d'usage quotidienne très importante de la part de leurs utilisateurs. Elles représentent donc chacune des milliards d'heures de "temps de cerveau" (comme disait Patrick Lelay) potentiellement monétisables auprès d'annonceurs publicitaires... La question de leur valorisation est donc la même que celle de leur potentielle monétisation. Celle-ci reste évidemment incertaine puisque les utilisateurs n'ont pas adopté ces produits pour se voir exposés massivement à de la publicité... Mais ces mêmes utilisateurs tolèrent la publicité dont ils comprennent qu'elle est justifiée par la gratuité des services rendus. Pour prendre l'exemple de Twitter, la société dépasser en 2014 la barre du milliard de dollars de chiffres d'affaires et celui-ci connait une croissance supérieure à 100%. Si cette croissance continue, la barre du milliard de dollars de profit sera elle aussi passée et la valorisation de Twitter jugée spéculative aujourd'hui sera légitimée... Tout dépendra donc pour ces "réseaux sociaux" à maintenir une forte croissance d'usage tout en augmentant progressivement la pression publicitaire... C'est un pari que toutes ne gagneront pas mais ce n'est pas du tout un pari perdu d'avance !  Facebook montre la voie en passant le cap des 3 milliards de dollars de profit cette année...

Quel est la différence avec la situation de l’époque, vous qui avez observé l’éclatement de la bulle sur place ?

En 1999/2000, les valorisations des sociétés internet cotées sur le Nasdaq anticipaient une arrivée extrêmement rapide des utilisateurs qui finalement ont mis beaucoup de temps à adopter l'internet et ses services... Aujourd'hui, presque 15 ans après, ils sont là et bien là et ils sont connectés en permanence avec leurs smartphones... L'éventuelle "bulle" technologique actuelle est donc moins spéculative car l'adoption et les usages sont réels. Maintenant dire qu'un utilisateur Facebook "vaut" 100 dollars ou le double ou la moitié est un exercice de prédiction particulièrement périlleux. Tout dépendra de la trajectoire future de la plateforme.

On se pose souvent la question du modèle économique de ces applications internet. Qu’est-il exactement ?

Ces applications sont une illustration de ce que seront les media grand public de demain... à savoir des modèles économiques financées très largement par la publicité. Si cette publicité est jugée acceptable par les utilisateurs comme les lecteurs de magazines papier acceptent de feuilleter des pages de publicité, ces modèles convergeront économiquement... Si les utilisateurs "zappent" et migrent en masse vers de nouvelles applications (initialement sans publicité), les applications délaissées mourront comme Myspace quand elle a été supplantée par Facebook...

Le marché de la publicité en ligne se porte mal. Peut-il remettre en cause la valorisation de ces sociétés ?

La publicité internet "display" sous forme de bannières classiques a clairement atteint un plateau et souffre d'un inventaire trop important donc faiblement monétisable. D'autres formats comme la video, le "brand content", le "native advertising"... sont en forte croissance. Tout dépendra donc de la capacité de ses sociétés à créer des formats publicitaires "efficaces" (acceptés par les utilisateurs et entraînant un "engagement" réel avec l'annonceur)... Les "sponsored stories" de Facebook montre encore une fois que cela est possible...

En tant que dirigeant d’une business angel, quels sont les critères que vous retenez pour financer une start-up ?

Le fonds ISAI que je dirige applique une grille d'analyse assez classique: qualité de l'équipe dirigeante, viabilité et intensité capitalistique du business model et analyse de l'environnement concurrentiel présent et prévisible... Mëme si sur ces bases, nous avons une "thèse d'investissement", celle-ci comporte toujours une part d'incertitude et de pari. Nous pouvons sur-estimer comme sous-estimer le potentiel d'une entreprise... Quand, par exemple, nous avons investi en 2010 dans covoiturage.fr (devenu Blablacar depuis), nous avons sous-estimé l'adoption aujourd'hui massive de la pratique du covoiturage "long distance". Nous sommes en l'occurrence  ravis de nous être trompés.

Mise à jour le Mardi, 30 Décembre 2014 14:00  

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