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Home Actualités du secteur Mai 2010 Hadopi lisse son image

Hadopi lisse son image

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La Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet (Hadopi) a tenu lundi sa première conférence de presse. Les modalités d'application de la loi, le calendrier opérationnel et l’organisation interne se précisent.

Les doutes sont nombreux sur l’efficacité du dispositif et la méfiance est souvent de mise vis-à-vis de la loi Hadopi 2 qui passe pour être au mieux “inopérante“, au pire “liberticide“.

En conférence de presse, les responsables de la Haute Autorité ont eu fort à faire pour convaincre que leur action ne sera pas synonyme de sanction, de flicage voire de prison.

Autant d’images que le nouveau logo ne peut que renier, tant il est sobre. La Présidente, Marie-Françoise Marais, souhaite une image plus douce : celle d’une « autorité indépendante capable de veiller, de dialoguer et d’orienter ».

« J’ai bien l’intention de ne pas limiter le travail

de la Haute Autorité au seul envoi de mails »

(Eric Walter)

« J’ai bien l’intention de ne pas limiter le travail au seul envoi de mails » a insisté Eric Walter, Secrétaire général de la Haute Autorité. Alors que la Hadopi est devenue synonyme de sanctions, ses instances dirigeantes, nouvellement élues ou nommées, souhaiteraient la voir citée à côté du terme « innovation ». D’après Eric Walter, la Hadopi doit en effet devenir « force de proposition pour tout ce qui a trait à la diffusion des œuvres sur Internet ». Les Labs (1), ateliers de réflexion réunissant tout le panel des acteurs concernés, concrétisent cette volonté. Leurs travaux, assure-t-on du côté de la Haute Autorité, influenceront les décisions du Collège. Un appel à candidatures pour intégrer ou diriger l’un ou l’autre de ces ateliers sera lancé d’ici le mois de juin.

« Les pirates ne sont pas le cœur de cible.

C’est la négligence caractérisée dans la protection de l’accès Internet qui est visée  »

(Mireille Imbert Quaretta)

Mais la Hadopi ne se contente pas de « promouvoir ». Il s’agit évidemment de protéger les ayant-droits contre le piratage. Pourtant, « Les pirates ne sont pas le cœur de cible » a martelé la présidente de la Commission de la Protection des Droits (CPD), « le bras armé de la Hadopi », si l’on en croît nombre de médias. « Le répressif est inapplicable et inadapté. Il s’agit d’une loi d’incitation et de pédagogie », a souligné Mireille Imbert Quaretta. Dans la mesure où la fiabilité de l’adresse IP est largement remise en question, la Hadopi a adapté sa stratégie : il s’agit d’amener les titulaires de connexions non sécurisées, utilisées pour le téléchargement illégal, à sécuriser leur accès. Il s’agit là d’une obligation légale, comme le rappelle le premier avertissement du processus de réponse graduée (voir encadré ci-dessous *). La liste des œuvres ainsi que les dates et heures du téléchargement ne sont que des pièces du dossier, les éléments matériels de la contrefaçon, nécessaire aux ayant-droits pour saisir la Haute Autorité. Le cas échéant, les pirates démasqués pourront certes faire l’objet de poursuites pour contrefaçon, mais Mireille Imbert Quaretta a insisté : « Ce n’est pas là le cœur de la loi Hadopi 2 ».

Quant à affirmer que cette loi est obsolète avant même sa mise en application, Jacques Toubon, membre du Collège, a tenu a apporter quelques nuances : « La thèse selon laquelle l’action de la Hadopi se limite à un moyen d’échange déjà supplanté par d’autres est fausse en droit et en fait ». Le moyen d’échange en question est le peer-to-peer, seul à être mentionné dans le décret d’application, auquel les pirates peuvent préférer d’autres alternatives  (streaming illégal, visionnage sans téléchargement, téléchargement sur des sites d’hébergement de fichiers...). « Le décret d’application ne mentionne que le peer-to-peer », reconnaît l’ancien ministre, « mais il ne faut pas penser qu’il est le seul concerné ».

« Il sera techniquement possible d’envoyer les premiers

avertissements à la fin du mois de juin »

(Eric Walter)

Les membres de la Haute Autorité ont donc les idées claires sur leurs principes d’action. En attendant de se frotter aux inévitables aléas de la mise en application, le déploiement opérationnel se poursuit.

A terme, a-t-on expliqué, 50 à 70 agents assureront l’ensemble des missions. 40% d’entre eux seront spécialisés dans la gestion des procédures d’avertissement. Les autres seront repartis au sein des quatre directions : juridique, finances et développement, système d’information, communication et relations extérieures. Le Collège et la CPD seront prochainement appelés à se prononcer sur le budget, qui sera ensuite présenté au Gouvernement. Le système appelé à gérer l’interconnexion entre le système d’information des ayant-droits et celui des opérateurs sera opérationnel d’ici la fin du mois de juin. « Il sera donc possible d’envoyer les premiers avertissements à ce moment », a précisé Eric Walter. Avant l’envoi d’un éventuel second avertissement, six mois après le premier, Michel Riguidel (2) aura rendu les conclusions de sa mission sur la labellisation des moyens de sécurisation à l’usage des abonnés et les quatre décrets en cours d’élaboration (3) seront sans doute promulgués.

Par Armel Forest


(1) Réseaux et Techniques / Economie numérique de la création / Usages en ligne / Internet et Droit / Ethique et Société / Start Up et business angels.

(2) Enseignant chercheur à Télécom ParisTech, il doit rendre ses conclusions en septembre prochain.

(3) Labellisation de l’offre légale ou des moyens de sécurisation, décret relatif à la procédure de la Commission de la Protection des Droits et décret relatif à l’infraction de négligence caractérisée.

 

*Le processus de réponse graduée

Un titulaire de droit saisit la Commission de la Protection des Droits (CPD) par procès verbal. Après examen de la plainte, la CPD décide ou non d’enclencher le processus de réponse graduée. Elle demande au FAI concerné de lui communiquer les données pour envoi d’une première recommandation.

1ère recommandation par courrier électronique. Elle rappelle l’obligation légale de surveillance de l’accès à Internet et les sanctions encourues. Elle contient aussi une information sur les moyens de sécurisation et sur l’offre légale et mentionne la date et l’heure des faits reprochés, les coordonnées où l’abonné peut adresser d’éventuelles observations et demander la liste des œuvres concernées par les faits.

Dans un délai de six mois

En cas de réitération, la CPD envoie une 2ème recommandation par courrier électronique et par lettre recommandée. Elle contient les mêmes éléments que la première.

Dans un nouveau délai d’un an

En cas de réitération, la CPD peut décider de transmettre le dossier au Procureur de la République. Elle notifie alors sa décision à l’abonné qui a la possibilité de demander une audition à laquelle il peut se rendre accompagné du conseil de son choix.


A tous les stades de la procédure, la CPD réévaluera sa décision. Quant à l’abonné mis en cause, il peut à tout moment faire valoir ses observations.

Mise à jour le Mercredi, 05 Mai 2010 08:24  

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