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Home Actualités du secteur Octobre 2010 La concurrence au cœur du numérique

La concurrence au cœur du numérique

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Infrastructures, neutralité, intégration des contenus des FAI, publicité en ligne… L’univers numérique voit se profiler des enjeux importants de régulation de la concurrence. Pour les évoquer, Bruno Lasserre, président de l’Autorité de la concurrence, était l’invité du Club Parlementaire du Numérique mercredi dernier.

 

 

La réunion de rentrée du Club Parlementaire du Numérique a été placée sous le signe de la concurrence, problématique qui s’étend du déploiement des réseaux au développement des usages. « Toute la difficulté de la régulation de la fibre réside dans le fait que l’infrastructure en question n’existe pas encore, contrairement à l'expérience précédente du cuivre ». Bruno Lasserre, président de l’Autorité de la concurrence, a débattu avec une soixantaine de parlementaires et d’acteurs de l’économie numérique, sans éluder les nombreuses incertitudes liées au déploiement naissant des réseaux très haut-débit.

« La fibre offre l’opportunité de sortir d’une régulation lourde, comme celle mise en place pour la boucle locale en cuivre »

Concurrence par les infrastructures ou par les services… Investissements publics. Pour Bruno Lasserre, il ne saurait y a voir une réponse unique à favoriser.

En zone dense, la fibre offre l’opportunité d’innover au bénéfice des consommateurs « tout en mettant en place un cadre qui va structurellement favoriser la concurrence, permettant aux opérateurs de se libérer de la boucle locale ».

Conscient qu’en zone moins dense le problème se pose différemment, le président de l’Autorité de la concurrence a évoqué une régulation qui « favorise la concurrence par les services » et affirmé qu’il y a également la place pour une intervention publique. Consultée dans le cadre du programme national très haut-débit, l’Autorité s’est prononcée en faveur de l’intervention des collectivités.

Séparation entre réseaux et services ?

Interrogé sur la séparation fonctionnelle entre réseau et services, Bruno Lasserre a répondu : « Il vaut mieux réguler avant de proposer ce type de séparation. Mais il ne faut pas se l’interdire si elle s’avère être le seul instrument à même de garantir une concurrence effective », a-t-il ajouté.

Sans parler de séparation fonctionnelle, d’autres participants au débat ont interrogé le président de l’Autorité sur un modèle alternatif à la concurrence par les infrastructures, adapté aux zones moins denses. Un appel à candidature pour une concession ou une DSP couvrant l’ensemble de la population concernée, grâce à un réseau ouvert à l’ensemble des opérateurs de service pour un tarif régulé permettrait la mise en place d’une péréquation et la couverture plus rapide des zones moins denses.

Des inquiétudes sur les délais dans lesquels ces zones moins denses accèderont au très haut-débit se sont exprimées. En distinguant les zones denses n’a-t-on pas fait monter le prix de couverture des parties moins denses et compromis les efforts de péréquation ?  La couverture de l’ensemble du territoire n’en pâtira-t-elle pas ?

 

Des idées novatrices ont fait surface, comme l’éventuelle implication de nouveaux acteurs : les entreprises du BTP en l’occurrence, qui pourraient investir leur argent dans des infrastructures somme toute assez simples (trous, fourreaux et câbles). Alors que les comptes des collectivités sont affectés par la crise, n’est-on pas en train de manquer l’occasion de mettre en place un gigantesque financement de projet qui permettrait d’aller plus vite et plus loin ? S’est-on interrogé lors du débat.

Neutralité : « Je suis opposé à une régulation ou à une législation du partage de la valeur »

Pour Bruno Lasserre, le débat sur la neutralité de l’internet pose des questions classiques. Certaines touchent aux libertés publiques et à la protection des consommateurs. D’autres ont trait au partage de la valeur, préoccupation qui touche tous les secteurs industriels. Qui va payer pour l’innovation et les investissements ? Comment la valeur est-elle partagée entre les acteurs d’une même chaîne verticale ?

L’opinion du président de l’Autorité de la concurrence est tranchée : « Toute régulation ou législation du partage de la valeur est vouée à l’échec ». « Vous ne pouvez pas éviter les stratégies de contournement par les acteurs économiques dont la réponse va toujours plus vite que la technique législative », a-t-il argumenté.

Pour Bruno Lasserre, les compétences que le législateur veut donner à l’Arcep pour régler des différents entre acteurs économiques est une bonne chose. « Le droit de la concurrence peut aussi être une réponse en cas d’abus de position dominante », a-t-il ajouté.

 

« Google occupe-t-il une position dominante sur le marché de la publicité en ligne ? »

A propos d’abus de position dominante, le cas du marché de la publicité en ligne et la position de Google ont été évoqués. L’Autorité entend examiner prochainement le fonctionnement de la publicité en ligne et l’existence ou non d’un modèle pertinent de publicité liée aux moteurs de recherche. Un avis sera rendu au mois de décembre qui statuera également sur un éventuel abus de position dominante de Google.

Pour sa part, Jean Dionis du Séjour s’est dit dors et déjà convaincu qu’un marché émerge, « très différent des bandeaux déjà visibles sur Internet ». La question est plutôt de savoir, si sanction il doit y avoir, comment l’appliquer à une multinationale qui, dans le domaine du numérique, est mouvante par essence.

Bruno Lasserre a tenu à préciser qu’il ne sanctionnerait pas une position dominante en tant que telle mais un éventuel abus de pouvoir de marché et qu’un standard législatif permet à l’Autorité de la concurrence de prononcer une sanction qui s’élève jusqu’à 10% du chiffre d’affaires mondial du groupe dont dépend l’entreprise…

 

« est-il possible de réglementer le prix d’un livre numérique vendu par des plates-formes hébergées dans le monde entier ? »

Concernant le prix unique du livre numérique et une éventuelle transposition de la loi Lang, Bruno Lasserre s’est montré très réticent. « Un prix unique du livre numérique est-il possible alors que l’offre de services qui se construit (forfaits, abonnements…etc…) s’annonce foisonnante ? ». D’autre part, « est-il raisonnable de vouloir réglementer le prix d’un livre numérique vendu par des plates-formes hébergées dans le monde entier ?».

L’application au livre numérique des principes de la loi Lang, élaborée pour les supports papier, ne semble pas pertinente au président de l’Autorité de la concurrence. Il enjoint plutôt les éditeurs français à mutualiser leurs efforts pour créer des plates-formes communes  capables de répliquer à Amazone ou à d’autres acteurs plus puissants.

La soirée s’est achevée sur un échange entre différents acteurs de l’économie numérique  sur différents aspects de la concurrence par les infrastructures.

Mise à jour le Vendredi, 15 Octobre 2010 13:34  

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