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Home Telecom Corinne Erhel : « le filtrage doit être précédé d’une décision d’un juge »

Corinne Erhel : « le filtrage doit être précédé d’une décision d’un juge »

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Le rapport de la mission d’information sur la neutralité d’Internet et des réseaux menée par Laure de La Raudière (UMP, Eure et Loire) et Corinne Erhel (SRC, côtes-d’Armor) devrait être rendu fin mars. Les premières orientations de la mission ont été publiées. Le débat est donc ouvert. Corinne Erhel nous en donne la teneur.

Quelles sont les points qui ressortent des premières orientations de la mission d’information sur la neutralité de l’Internet et des réseaux ?  

   Cette mission a démarré début octobre l’année dernière. On a auditionné 85 acteurs (petits et grands). J’ai découvert beaucoup d’acteurs passionnants. On a essayé, à partir de ces débats, de résumer la problématique de la neutralité des réseaux et de faire un certain nombre de préconisations. On a soumis les premières conclusions aux 85 personnes auditionnées. A elles de nous faire un retour sur ces premières orientations. On souhaite atteindre des objectifs en matière de filtrage (encadrement des mesures obligatoires de filtrage d’Internet) et supprimer l’article 4 de la Loppsi : le filtrage doit être précédé d’une décision d’un juge. Si on veut parler de neutralité, c’est le préalable.

 

Pourquoi le juge doit-il intervenir ?

A partir du moment où on décide de filtrer ou bloquer un site on sait qu’il peut y avoir des effets pervers en terme de surblocage et de risques liés à la tenue d’une « liste noire » de contenus filtrés. On demande à ce que ces types de mesures ne soient imposés qu’à l’issue d’une procédure faisant intervenir un juge. On est en démocratie et c’est un point important. Le filtrage d’Internet doit être interdit sauf mesures obligatoires ou nécessité technique. Nous devons également encadrer les techniques d’analyse des informations transmises.

Quels autres points sont soulevés par votre mission ?

Le deuxième point sur lequel la mission s’est arrêtée est la gestion de trafic en proposant dans les objectifs à atteindre l’exigence d’une qualité de service suffisante sur Internet et d’une obligation de transparence, l’interdiction des mesures de dégradations ciblées de la qualité de service, le développement de la qualité de service de façon non discriminatoire. On a également proposé des objectifs en matière d’interconnexion.

A partir de là, on sait qu’il  y a déjà des textes en vigueur ; la transposition du paquet télécom arrive également. La question posée aux 85 acteurs – en plus de leur conception de la neutralité -  concernait donc la nécessité ou l’inutilité de la prise de mesures législatives complémentaires. Dans les premières orientations, on recommande la prise de mesures complémentaires notamment la définition du principe de neutralité au niveau législatif à partir des objectifs évoqués. Ce qui nous paraît important c’est la consolidation des dispositions concernant les mesures obligatoires de filtrages. On attend la réaction des acteurs consultés.

Quel est l’intérêt de mettre dans la loi le principe de neutralité ?

L’intérêt est de fixer, de donner une définition et un contenu à ce principe de neutralité de façon à ce qu’il s’applique. Tout dépend de la définition et de la codification qu’on en fait. Il faut que l’on soit d’accord sur les objectifs et la  définition que l’on met derrière le principe de neutralité.

Comment vous situez vous par rapport à la proposition de loi socialiste sur la neutralité ?

La proposition de loi de Christian Paul a été déposée l’été dernier car c’était un sujet prégnant. La commission des affaires économiques a décidé de créer une mission d’information à partir d’octobre également au vu de l’actualité. La proposition de loi a été inscrite à l’ordre du jour (elle entre en commission le 9 février) et la mission d’information rendra ses conclusions fin mars.

Renforcer le pouvoir de l’Arcep, comme vous le préconisez dans votre pré-rapport semble poser deux problèmes : l’un quant à l’indépendance politique de l’Arcep (si un commissaire au gouvernement est présent au sein de son collège) l’autre relatif à son objectivité vis-à-vis des acteurs du marché.

Je me suis exprimée contre la nomination d’un commissaire au gouvernement au sein de l’Arcep. Si on veut une autorité indépendante, il ne faut évidemment pas de commissaire au gouvernement sinon c’est un non-sens. Mais je ne suis pas au gouvernement et cela relève de la responsabilité de la majorité.

Quant à l’avis des acteurs du marché, on attend leurs remarques et réactions. Le pré-rapport est une synthèse des avis des acteurs auditionnés. Entre le pré-rapport et le rapport final on tiendra compte des nouveaux avis et réactions qui nous seront remontés.

L’Arcep ne va-t-elle pas vers un rôle type Hadopi ?

J’ai voté contre la loi Hadopi. Je conteste toujours l’Hadopi dans sa structure, ses objectifs et son coût (12 millions d’euros). Mais l’Arcep est différente car c’est une autorité de régulation avec des pouvoirs spécifiques de régulation. Reste à maintenir son indépendance…

Comment s’est déroulée votre collaboration avec une député de la majorité, Laure de La Raudière ?

On a des points de divergence mais on s’est rassemblée sur la notion de filtrage et de l’intervention du juge. C’est un point fort et intangible. Le sujet du numérique doit être discuté et nous avons essayé de faire les choses de manière transparente. C’est pour cela que nous avons mis les premières orientations de la mission en consultation. Rien ne nous y obligeait.

Propos recueillis par Paul Chimbaud

Premières orientations de la mission d'information sur la neutralité de l'Internet et des réseaux

 

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