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Fiscalité du numérique - Proposition de loi du sénateur Marini - Franck Le Mentec : « ces nouvelles taxes vont surtout impacter très négativement les petites et moyennes entreprises ».

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Franck Le Mentec est avocat associé, Cotty Vivant Marchisio & Lauzeral, spécialiste, entre autre, des questions du numérique. Il est déjà intervenu au Forum de la Fiscalité du Numérique organisé au Sénat en février 2012 et répond à nos questions sur la proposition de le loi déposée jeudi 19 juillet par le sénateur Marini.

Quelles sont les nouveautés introduites dans la proposition de loi (PPL) du sénateur Marini ? A-t-elle plus de chance d’aboutir que la précédente en termes de faisabilité ? Pourquoi ?

En matière d’imposition des grands acteurs du numérique en France, la marge de manœuvre du législateur est en effet étroite, en particulier compte tenu des stipulations des conventions fiscales signées par la France et du droit de l’Union européenne.

De manière résumée, les conventions fiscales ne permettent pas à la France de soumettre ses acteurs basés à l’étranger à l’impôt sur les sociétés et le Droit de l’Union européenne interdit toute discrimination en matière fiscale entre les résidents étrangers et les résidents français.

Le projet envisagé apparaît éviter ces contraintes en ce qu’il introduit des taxes spécifiques, ne s’assimilant pas à de l’impôt sur les sociétés, et applicables tant aux régies françaises qu’étrangères.

Est proposée une nouvelle version de la taxe sur la publicité en ligne, s’appliquant aux régies françaises et étrangères – et non aux annonceurs comme l’était l’ancienne « taxe dite Google ». Cette nouvelle taxe serait calculée en appliquant un taux de 0,5% sur la fraction de l’assiette comprise entre 20 millions et 250 millions d’euros et 1% au-delà.

Il est aussi envisagé d’introduire une taxe sur les services de commerce électronique, visant à transposer au commerce électronique la taxe sur les surfaces commerciales.

La recette escomptée de ces deux mesures serait d’approximativement de 120 millions d’euros en 2013.

Enfin, le projet inclut une extension de la taxe actuelle sur la fourniture de vidéogrammes à la demande (VOD) aux acteurs étrangers de l’internet.

Estimez-vous réalistes les calculs de recettes fiscales évoqués par la PPL ? 

Les estimations fournies démontrent le caractère plutôt symbolique de ces mesures.

La difficulté est que ces nouvelles taxes vont surtout impacter très négativement les petites et moyennes entreprises – françaises ou étrangères – exerçant sur internet.

Le coût de l’administration des déclarations à déposer en France par les sociétés étrangères (par la désignation dans certains cas d’un représentant fiscal) pourrait d’ailleurs être supérieur au montant de la taxe à payer.

Cette nouvelle PPL assure qu’elle ne causera pas de nouvelle délocalisation puisqu’elle entend s’appliquer à toutes les régies, qu’elles soient françaises ou étrangères. Partagez-vous cette analyse ?

Cette égalité de traitement est exacte. La conclusion est en revanche erronée. En effet, ces impositions – symboliques – s’appliqueront certes de la même manière. En revanche, demeurera toujours des différences significatives d’imposition, qui peuvent fortement inciter des entreprises françaises à se délocaliser. Les véritables vecteurs de délocalisation sont ailleurs. Ce sont notamment les taux d’impôt sur les sociétés et de TVA applicables.

La PPL appelle à une mobilisation européenne, sans doute nécessaire à long terme. Pensez-vous que l’Union européenne puisse un jour légiférer sur la fiscalité du numérique ? La PPL du sénateur Marini peut-elle jouer un rôle moteur dans la recherche de synergie entre gouvernements européens ?

En effet, l’Irlande continuera à proposer un taux d’impôt sur les sociétés de 12,5%. Le Luxembourg continuera d’offrir un taux de TVA de 15% (même si cet avantage va s’estomper à compter du 2015, dès lors que la TVA applicable sera celle du pays de consommation).

La question essentielle est de savoir si l’on peut tolérer de telles différences fiscales entre les pays de l’Union européenne. Est-il acceptable que certains pays pratiquent un véritable dumping fiscal au détriment des autres ?

La seule réponse satisfaisante qui peut être apportée en matière de fiscalité du numérique ne peut être que collective, dans un premier temps au niveau européen.

La proposition du Sénateur Marini peut être considérée comme un point de départ. Le point d’arrivée semble toutefois encore bien loin.

Propos recueillis par Joseph d’Arrast

Mise à jour le Lundi, 23 Juillet 2012 13:22  

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